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QUATRIEME DE COUVERTURE

Aux trois quarts exterminés à la fin des guerres indiennes, en 1890, réduits à deux cent cinquante mille âmes, voilà que les Peaux-Rouges des Etats-Unis se comptent aujourd'hui un million deux cent mille! Le temps est venu de la renaissance indienne, démographique et même économique. Il existe d'innombrables livres sur les Indiens des Etats-Unis. Mais toujours sur les Indiens d'hier, comme si leur histoire s'était arrêtée au soir des dernières batailles, comme s'il s'agissait d'un peuple mort. On fait d'eux des sortes d'Etrusques, de Ligures ou de Mayas qui auraient définitivement quitté la scène du monde. Or, ils sont bien vivants !

Voyageant longuement dans les territoires indiens, Jean Raspail a résolument tourné le dos au passé. Il est allé regarder vivre les Peaux-Rouges d'aujourd'hui, divisés - c'est le mot - en trois cent dix tribus d'inégale importance. On retrouvera dans ce livre des noms familiers : Navajo, Cheyenne, Seminole, Apache, Sioux, Iroquois, Cherokee, Ho-pi, Nez percé ou Blackfeet, et beaucoup d'autres moins connus : Crow, Shinnecock, Miccossuckee, Havasupai, Choctaw, Chippewa, Poosepatuck ou Chemehuevi... toutes ces tribus passées à l'ère moderne, avec tous les problèmes que leur pose l'adaptation à la civilisation américaine toute-puissante qui les entoure. Certaines réussissent, d'autres moins, certaines acceptent, d'autres refusent, car il y a autant de réponses à cette question majeure qu'il existe de tribus indiennes.


TABLE DES MATIERES
	1 : mythe et réalité. UN PONT SUR LE DÉTROIT DE BERING. LIBERTÉ, SIMPLICITÉ. LE BON SAUVAGE. BON INDIEN : INDIEN MORT. LA FIN DE LA PISTE. LES SURVIVANTS. LE MIRACLE. LE NOUVEAU MYTHE. RÉSERVES ET TRIBUS. LES INDIENS ET MOI. 2 : sur la côte atlantique, les tribus du miracle. BROADWAY, PISTE INDIENNE. LES JOCKEYS DES NUAGES. FANTOMES A LONG ISLAND. LE ROUGE ET LE NOIR. A COUPS DE FUSIL. UNE SOUVERAINE. LE GRAND LIVRE DES SHINNECOCK. LES TRIBUS EN POUSSIÈRE. 3 : le soleil se relève à l'est. LA PISTE DES LARMES. TOMAHAWKS CHINOIS. FAUX VRAIS OU VRAIS FAUX? UN GRAND SORCIER ÉLECTRONIQUE. UN MAQUIS EN FLORIDE. 1961-1990 : LA QUATRIÈME GUERRE. LES DERNIERS SEMINOLE. DANS LES MARAIS DES EVERGLADES. UNE ÉTRANGE CONVERSATION. LA TRIBU DU MYSTÈRE. LA GUERRE DES ONONDAGA. 4 : la terre de l'homme rouge. LA COURSE A LA TERRE. ÉMIRS PEAUX-ROUGES. LE P.-D.G. DES OSAGE. DANSE DE GUERRE CHEZ LES NOTABLES. LES SURPRISES DE L'INDIANITÉ. MADEMOISELLE CHEROKEE. GÉRONIMO. LES MAINS QUI PARLENT. RÉSURRECTION DES LOUPS. LA BATAILLE DE WASHITA RIVER. LES BISONS. 5 : vagabonds et Pueblo. L'IRRÉSISTIBLE ASCENSION DES NAVAJO. NAISSANCE D'UNE NATION. MONUMENT VALLEY. LES RENDEZ-VOUS DE L'AME. INDUSTRIE PEAU-ROUGE. INDÉPENDANCE OU INTERDÉPENDANCE? TENSIONS AUX FRONTIÈRES. LES SAGES DU COLORADO. LES FILS DE GÉRONIMO. L'HÉRITAGE DES ANASAZI. INTERDIT AUX BLANCS. HOPI, PUEBLO, URANIUM ET CATHOLICISME. LA VILLE DANS LE CIEL. TAOS : VIE ET MORT. LES HISPANO-AMÉRICAINS. TIGUA OU PAS TIGUA ? 6 : les seigneurs des plaines. WOUNDED KNEE 1890-1972. L'ATTAQUE DU TRAIN DE NEUF HEURES. LES SIOUX. PIEDS NOIRS ET NEZ PERCÉS. PLENTY COUPS, HOMME SAGE. LES SURPRISES DE CROW AGENCY. MELODY, PRINCESSE INDIENNE. LA PRIÈRE DES CROW. DOUBLE MORT DE CUSTER. 7 : les survivants du Pacifique. ISHI ET LES SANTA ROSA. L'EAU DE FEU. INDIENS CUYAPAIPE : 2. AU GRAND NORD. 8 : l'avenir. POUVOIR ROUGE. UN ÉTRANGE MAQUIS. LES IMMIGRÉS DE L'INTÉRIEUR. LE MESSAGE DES PEAUX-ROUGES. appendice I MÉMORIAL DES TRIBUS DISPARUES. appendice II L'HÉRITAGE VIVANT DES PEAUX-ROUGES OU : CE QUE LES BLANCS DOIVENT AUX INDIENS. appendice III HUMOUR INDIEN. appendice IV LES TRIBUS VIVANTES DES ÉTATS-UNIS. appendice V TRIBUS « FANTOCHES » D'OKLAHOMA. appendice VI LES DERNIERS DES MOHICAN. appendice VII CUISINE PEAU-ROUGE. appendice VIII TOURISME ET RÉSERVES INDIENNES. appendice IX LES INDIENS AMÉRICAINS, LA LOI ET LA POLITIQUE. BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE..

LE DÉBUT
Les Peaux-Rouges sont un mythe. Les Peaux-Rouges existent. Quasiment disparus à la fin du xix^e siècle, devenus presque aussi rares que les bisons en 1890, les voilà ressuscites. Mieux, aux États-Unis, ils sont plus nombreux que jamais ! Plus nombreux même que les dizaines de milliers de livres qui leur ont été consacrés à travers le monde entier. On les dirait sortis de notre imagination, nous échappant soudain pour clamer à tout vent : « Nous sommes toujours nous-mêmes mais nous sommes différents. La mort est passée mais nous sommes bien vivants. Il faudra compter avec nous! » Entre le mythe indien et sa réalité, c'est vrai, l'espace de ce livre, il nous faudra constamment naviguer. Les Indiens se ressemblent et ils ne se ressemblent pas. On les croit semblables au mythe et puis ils le rejettent d'un haussement d'épaule, mais c'est justement à l'instant où ils s'en éloignent le plus que d'une brusque "volte-face ils s'y plongent à nouveau. A la fin de mon long voyage dans les réserves indiennes des États-Unis, après avoir visité plus de trente tribus toutes entrées dans le monde moderne à trois ou quatre exceptions près, je ne parvenais toujours pas à rencontrer un Indien sans aussitôt lui superposer le mythe. Comme si le voir conduire son auto, entrer dans sa maison, faire ses achats au supermarché, me recevoir dans son bureau, me servir au restaurant ou à la pompe à essence, porter des vêtements semblables aux miens, parler anglais, jouer au base-ball ou n'importe quoi du même genre ne pouvait être qu'un accident, un comportement tout à fait anachronique, et qu'il allait dans l'instant interrompre ces excentricités, se couvrir de plumes et sauter sur son cheval. Le mythe a la vie dure. Même si c'est aux Indiens d'aujourd'hui, comme mon titre l'indique, que je m'intéresse exclusivement. Car les Indiens, quoi qu'on y fasse et fussent-ils devenus de bons Américains moyens, c'est toujours en Peaux-Rouges qu'on les souhaite, qu'on les veut, qu'on les voit, qu'on les habille, tomahawk, mocassins et tout le tremblement, pour les expédier autour de leurs feux de campement et tourner en rond devant leurs tepee pointus. Hugh! J'ai dit! Cette disposition naïve ne m'a jamais quitté. A tel point qu'à la fin de mon voyage, chez les Indiens Crow, dans le Montana, une magnifique tribu où je me trouvai un jour de fête, tombant sur un extraordinaire cortège de cavaliers en coiffure de guerre, vêtus de peau blanche et lançant de leurs voix de gorge des appels qui avaient l'air d'incantations, sublimes seigneurs de la plaine, je m'écriai : « Enfin! Des Indiens ! », tant le mythe a la vie dure. J'ai acquis la certitude que, même à leurs propres yeux, les Indiens se sont transformés en mythe. Heureux hommes ! En dépit de leur destin tragique et du monde nouveau qui s'avance — comme il s'avance, tout aussi inquiétant, à notre propre rencontre —, ils ont conservé l'essentiel, le ferment de l'éternité, peut-être ce qui nous manque le plus aujourd'hui, à nous autres les Blancs : ils ont conservé le mythe.


L'auteur et son «premier» Indien : Mais où est la vérité?