«On avait, paraît-il, sauvé toutes les princesses sans m'attendre.»
Jean Giono

« N'attendez rien des Indiens, vous ne serez jamais déçu.»
Vine Deloria
écrivain sioux (1973)

 

 

Robert Laffont, 1980

 

QUATRIEME DE COUVERTURE

TABLE DES MATIERES

EXTRAIT - PREMIER CHAPITRE

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QUATRIEME DE COUVERTURE

Tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin aux Antilles ont lu les deux célèbres tomes de Secouons le cocotier que Jean Raspail a consacrés à ces îles, ou leur réédition en un seul volume. Best-seller de la Caraïbe depuis plusieurs années, devenu un classique, loué sans réserve ou violemment critiqué, mais extraordinairement libre, ce livre n'a laissé personne indifférent.

Avec Bleu caraïbe et citrons verts, Jean Raspail ne nous donne pas une suite, ni tout à fait une fin, mais plutôt un contrepoint romantique. Cette fois encore, l'itinéraire de Jean Raspail n'est pas banal : la piste perdue des Indiens Caraïbes, qui furent pendant des siècles-les seuls maîtres de ces îles. Cette piste le conduit d'Haïti aux îles Grenadines, en passant par Saint-Barthélémy, Saint-Eustache, Saint-Kitts, la Guadeloupe, Marie-Galante, la Dominique, la Martinique, et même par Lausanne et Nancy, ce qui n'est pas le moins surprenant. Et bien d'autres personnages surgissent au détour de cette piste caraïbe... Pour ses adieux aux Antilles, Jean Raspail a choisi des sentiers résolument écartés. Ce sont les seuls souvenirs qui durent.

 

 

TABLE DES MATIERES

  1. Mes Antilles parallèles

2. Piste caraïbe

3. Comment dit-on la neige, en caraïbe?

4. L'Arouague et le routard

5. Amazones et lavandières

6. Discours au roi

7. Audience

8. Au nom du Père, du Fils, et du Grand Caïman

9. Safari caraïbe

10. Les jardins de Marie-Galante

11. Rosé, de la Grande Vigie

12. X,, Y. et Z. de la pointe des Châteaux

13. Piste juive

14. Rendez-vous à Clipperton

15. Fantômes au Sud

PREMIER CHAPITRE

Mes Antilles parallèles

M'y revoilà. J'avais pourtant bien juré...

Après huit ans d'absence, m'y voilà de nouveau, nomade d'île en île, attendant un bateau sur un quai, un avion de ligne dans une salle de transit torride et surpeuplée, un yacht charter, un avion taxi, une goélette, pressé de fuir et d'effacer pour renaître au souvenir inconnu, l'espace d'un bras de mer à franchir.

« L'islomanie, écrit Michel Déon, est peut-être une maladie inguérissable. Est-il besoin de préciser qu'elle est le contraire des voyages? » Le chapelet des îles... La compagnie Z annonce le départ de son vol n° 232 pour... Mon corps se meut. Ma main tend un passeport. Mon identité se déplace. Est-il besoin de préciser qu'à l'intérieur de moi-même rien ne bouge? J'ai mon île dans ma tête, entourée d'un flot bleu que mon cœur agite en tempête lorsqu'il me faut la protéger. Cette île, je la peuple à mon gré au hasard de mes goûts. J'en suis le cerbère romantique. J'entrouvre seul la muraille liquide avec des clefs connues de moi seul, et quand je quitte une île de terre et d'eau pour une autre, sur le grand arc antillais de la mer des Caraïbes, je l'oublie ou je l'accueille comme une ombre portée de la mienne, selon qu'elle s'est révélée digne ou non de mon modèle immobile. Immobile? Peut-être que non. Mais je voyage parallèlement.

Autant l'annoncer d'entrée à mes anciens lecteurs des Antilles, irrités ou fidèles, je ne ressens plus tellement le désir de secouer le cocotier . J'en ai tant fait, naguère, que l'effort serait aujourd'hui trop grand, et, de ce côté-là, j'ai des crampes. Sans compter le risque de se retrouver étendu pour le compte, le crâne fendu par une noix de coco premier choix qu'on n'aurait pas entendue tomber. Maintenant, là-haut, ils répondent...

Qu'on me laisse donc accorder ma musique à d'autres appels insulaires, fanfares lointaines que je m'imagine seul à entendre. Pour l'illustration de ma motricité antillaise apparente, que l'on sache seulement, à titre d'exemple, que j'ai dépensé ce qui pour moi représentait une petite fortune dans l'unique but d'aller contempler, au sein d'un dédale d'îles et de rochers, émergée dans toute sa splendeur funèbre, l'épave rouillée d'un grand paquebot que j'avais senti naguère vibrer sous mes pieds et que j'avais connu blanc et beau... Que je me suis fait conduire sur une île misérable d'ancienne mouvance britannique à seule fin d'y rencontrer, réfugié à son sommet et rayonnant de sa bonté sur tout un peuple noir de pêcheurs d'un autre âge, une sorte d'ermite catholique qui m'a fait l'effet d'être un saint, de ces étranges saints d'aujourd'hui pétris de doute et de foi... Que dans telle autre île je n'ai cherché que l'empreinte insolite du peuple hébreu, et, partout, que le souvenir vivant des Indiens caraïbes m'a engagé sans retour, tout au long de ce voyage, hors des chemins du commun. Paul Morand a écrit naguère : « Les îles seront peut-être le refuge des dernières aristocraties alors que les continents vont être écrasés sous les masses. » Les masses... Tendons le dos! Tournons-le! On ne distingue déjà plus le contour de certaines îles, aux Antilles, obscurcies par le vol lourd des masses. Il faut se hâter. Imaginer. Chercher. Qui me comprenne me suive...

Jean Raspail dans les réserves indiennes autonome de Qalla River (Île de la Dominique),
avec Frédéric Hillary, cacique souverain des Caraïbes, héritier des rois Caraïbes, et
de mille ans d'indépendance.

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